Perspective

La nomination d'un gouvernement de droite par Macron et la faillite de Mélenchon

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Le nouveau Premier ministre français Michel Barnier regarde à droite lors de la cérémonie de passation de pouvoir, jeudi 5 septembre 2024 à Paris. [AP Photo/Stephane de Sakutin]

La nomination de Michel Barnier au poste de Premier ministre par Emmanuel Macron marque un effondrement historique de la démocratie française. Macron a refusé un Premier ministre issu du Nouveau Front populaire (NFP) de Jean-Luc Mélenchon, arrivé en tête des élections du 7 juillet. Après sept semaines de pourparlers, il a nommé un gouvernement minoritaire de droite qui sera le premier en France depuis le régime de Vichy à s'appuyer sur le soutien de l'extrême droite.

Le RN d'extrême droite a déclaré qu'il soutenait Barnier, un partisan de l'OTAN, de l'austérité de l'Union européenne (UE) et des mesures anti-immigrés, y compris un moratoire de cinq ans sur l'immigration en France.

Les sept semaines de négociations sur le nouveau gouvernement visaient à imposer des politiques rejetées par les travailleurs en France et dans le monde. 89 pour cent des Européens de l’Ouest rejettent l’appel de Macron à envoyer des troupes en Ukraine, et la réforme des retraites qu’il imposa l’année dernière face à des grèves de masse pour financer le réarmement français est rejetée par 91 pour cent des Français. Mais les banques et l’appareil militaro-policier serrent les rangs derrière un gouvernement d'extrême droite pour imposer la guerre et l'austérité au peuple.

Des manifestations se déroulent aujourd’hui, et un conflit de classe explosif se prépare alors que Barnier prépare un budget d'austérité draconien. Selon les sondages, 57 pour cent des Français se méfient de Barnier et 74 pour cent pensent que Macron a méprisé les élections. Pour lutter contre le régime Macron-Barnier, cependant, les travailleurs doivent tirer des conclusions politiques critiques, surtout sur la faillite de Mélenchon et du NFP, qui ont été les facilitateurs de Macron.

Tout au long de l'été, le NFP s'est abstenu de mobiliser les millions de travailleurs qui ont voté pour lui. Comme le Parti de l'égalité socialiste (PES) avait averti, la formation du NFP par la France insoumise (LFI) de Mélenchon, le PS bourgeois, les Verts et le PCF stalinien n'était pas un pas en avant mais un piège pour les travailleurs. Après les élections du 7 juillet, le PES a écrit :

Mais le NFP vire à droite après les élections, sur la lancée de sa propre stratégie électorale opportuniste. Il avait conclu une alliance avec Macron contre le RN, par le désistement de ses candidats pour renforcer Ensemble et Macron. Depuis les élections, Mélenchon se concentre sur les négociations avec les forces de droite dans l'État capitaliste ; il a demandé à plusieurs reprises à Macron de le nommer Premier ministre, ce que Macron refuse de faire.

Les événements ont donné raison à l'évaluation du PES sur le caractère réactionnaire de la stratégie de Mélenchon. En démobilisant les travailleurs et en promouvant faussement Macron comme un opposant démocratique au néofascisme, il a donné à Macron le temps pour former un gouvernement de droite basé sur une alliance de fait entre Ensemble et le RN.

Des personnalités comme Mélenchon et des organisations comme le NFP remplissent une fonction bien précise : fournir une couverture politique à l'appareil d'État et à la classe dirigeante qui se précipite violemment vers la droite et bloquer l'intervention politique indépendante de la classe ouvrière sur son propre programme.

Mélenchon et le NFP ont leurs homologues dans tous les grands pays impérialistes : Jeremy Corbyn au Royaume-Uni, le Parti de gauche en Allemagne, Bernie Sanders et Alexandria-Ocasio Cortez aux États-Unis. Dans tous les cas, le rôle de ces personnalités et de ces partis est de faciliter le glissement vers la droite de l'ensemble du système politique.

Il faut préparer une contre-offensive de grèves et de manifestations dans la classe ouvrière, en mobilisant le sentiment de gauche contre ce président et ce gouvernement illégitimes. Il s’agit de libérer la vaste opposition objectivement révolutionnaire à l'ordre existant dans la classe ouvrière de l'emprise étouffante du NFP et de ses alliés dans les bureaucraties syndicales.

En 2023, une large majorité de Français voulait une grève générale pour stopper la réforme des retraites de Macron et le faire chuter, face à une colère explosive due à la répression des manifestations lorsque Macron a imposé sa réforme sans même un vote au parlement. Pourtant, les appareils syndicaux, soutenus par Mélenchon, ont simplement mis fin aux grèves après la promulgation de la réforme. Cela a ouvert la voie à une escalade continue de la guerre et à un basculement accéléré vers l'extrême droite dans la politique officielle.

L’étouffement de la lutte des classes par les partis du NFP sur des décennies permet au RN d’exploiter démagogiquement la colère sociale sur une base réactionnaire et xénophobe. La promotion par Mélenchon du populisme et du nationalisme contre l'unité internationale de classe des travailleurs contre le capitalisme crédibilise aussi le discours du RN pour les travailleurs en colère contre les trahisons du PS, du PCF et de Mélenchon. Ainsi, en 2022, Mélenchon a dit qu’il pourrait être Premier ministre sous un président néofasciste.

La classe ouvrière ne peut pas défendre la démocratie et s'opposer au virage à droite de la classe capitaliste en essayant d'imposer un gouvernement NFP pour négocier avec Macron et le RN. Il faut construire un mouvement dans la classe ouvrière contre le fascisme, la guerre impérialiste et le capitalisme, sur la base d'une lutte internationale pour le pouvoir ouvrier et pour le socialisme.

Cela nécessite de construire des organisations de lutte de base dans la classe ouvrière, indépendantes des bureaucraties syndicales liées au NFP, autour d'un programme véritablement révolutionnaire. Le PES propose notamment les revendications suivantes :

Non à la guerre impérialiste ! Stop à la guerre avec la Russie, démantelons l'OTAN, troupes françaises hors d'Afrique et du Moyen-Orient !

Il faut stopper l'escalade de l'OTAN contre la Russie, rejetée par l'écrasante majorité de la population. Il faut supprimer le budget militaire que Macron a imposé l'année dernière, financé par ses coupes dans les retraites. La France doit quitter l'OTAN dans le cadre d'une lutte internationale des travailleurs pour démanteler l'OTAN et mettre fin aux guerres impérialistes, y compris les guerres de la France dans son ancien empire colonial au Moyen-Orient et en Afrique.

Stop au génocide de Gaza ! Pas de poursuites contre les opposants au génocide !

Les travailleurs en France et à l'international doivent bloquer les livraisons d'armes au régime israélien. Les responsables israéliens accusés de génocide par les tribunaux internationaux, ainsi que les responsables français et de l'OTAN complices de ce génocide, doivent être poursuivis. Les poursuites contre les opposants au génocide de Gaza pour antisémitisme doivent cesser, et les travailleurs doivent s'opposer aux tentatives de l'extrême droite d'utiliser leur soutien au génocide israélien pour se présenter faussement comme des opposants à l'antisémitisme.

Abolir la présidence et dissoudre l’État policier !

La répression violente et d'arrestations massives visant les grèves et les manifestations sous Macron confirme que l’exécutive est le centre névralgique de l'État policier émergent. La montée de l'extrême droite au centre de la politique officielle française et européenne révèle le danger manifeste que cette machine se transforme en dictature fasciste. Il faut dissoudre la présidence, ainsi que les unités des CRS et de la gendarmerie.

Stop à la persécution des réfugiés et des immigrants ! Pour l'unité internationale de la classe ouvrière !

La mobilisation de la classe ouvrière exige une hostilité irréconciliable aux tentatives de la bourgeoisie de la diviser en incitant au nationalisme. Les travailleurs doivent lutter contre les mesures fascisantes répandues en France et dans l’UE : persécutions des immigrés par l'État, construction de camps de détention de masse pour les réfugiés et lois humiliantes interdisant les vêtements religieux islamiques, y compris les interdictions prônées par le NFP.

Abroger la réforme des retraites de Macron ! Des milliards pour l'emploi et les programmes sociaux !

Il faut supprimer la réforme des retraites et rejeter le mensonge selon lequel il n'y a pas d'argent pour l'emploi et les droits sociaux. Les milliers de milliards d'euros en fonds publics pillés par l'aristocratie financière au cours des dernières décennies doivent être saisis et utiliser pour répondre aux besoins sociaux de la classe ouvrière française et européenne. Cela nécessite la mobilisation des travailleurs et l'émergence d'organisations de la base sur les lieux de travail afin d’ôter le contrôle de la vie économique des mains des marchés financiers et de l'État policier.

Pour les États socialistes unis d'Europe !

Les meilleurs alliés des travailleurs en France contre la guerre, le fascisme, le génocide, l'austérité et le capitalisme sont les travailleurs à travers l'Europe et à l'international. Alors que Barnier prépare des mesures d'austérité sauvages coordonnées avec toute l'UE, il faut unifier la classe ouvrière européenne dans une lutte contre l'austérité et le capitalisme.

Le Parti de l'égalité socialiste, section française du Comité international de l’IVe Internationale, lutte pour construire une direction socialiste dans la classe ouvrière, avec pour but la conquête du pouvoir, l'abolition des institutions étatiques existantes et l'établissement d'un État ouvrier, pour réorganiser la vie sociale et économique sur la base des besoins sociaux et non du profit privé.

Il faut développer cette offensive révolutionnaire de la classe ouvrière en tant que mouvement européen et international, en remplaçant l'Union européenne capitaliste par les États socialistes unis d'Europe.

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